· 

Au Nord Ouest, les étangs d'Ibera

Lundi 17 Septembre 2018, nous sommes remontés de Buenos Aires le long du Rio Uruguay, frontière naturelle entre les deux pays. Arrêt nettoyage et rangement de Philéas au bord du fleuve dans la petite ville de Colon, aux rues en terre battue et aux voitures d'un autre âge.

Plus au nord, à 370 km c'est Mercedes et son camping municipal, un terrain herbeux au bout de la ville qui sert un peu à tout, stade de foot, barbecues, pâturage à moutons ... Nous on y trouve surtout de l'eau. On a testé une lessive en mettant le linge dans un bidon avec du savon secoué toute la journée sur la route. Pas mal. Mais il faut maintenant tout rincer et surtout bien essorer si on ne veut pas passer trois jours ici. Joies du voyage.

On s'installe donc, vite rejoints par les habitants les moins timides qui nous proposent de boire un maté tout en discutant. Pendant ce temps Aloys se fait un copain en lui apprenant le tir à l'arc.

Le maté se prépare avec la yerba maté, une feuille torréfiée et hachée,  comme du thé mais amère, tonique, que les Uruguayens et les Argentins boivent toute la journée dans une calebasse en aspirant le liquide avec une cuillère paille filtrante en inox, la bombilla. On remplit le bol de yerba maté puis il faut creuser un puits sur le côté et y verser un peu d'eau chaude. On aspire le liquide. Puis on rajoute de l'eau chaude au fur et à mesure.Il faut donc se trimballer avec un Thermos.

En nous arrêtant dans une station service nous avions rencontré des gens et leur avions fait chauffer de l'eau pour remplir leur Thermos. Ils m'avaient proposé d'aspirer le maté avec eux, ça se partage tout en papotant ! Pas mauvais, on s'habitue vite à l'amertume. On a acheté calebasse et bombilla à Montevideo mais je n'avais pas encore testé.

La petite ville de Mercedes est la porte d'entrée du parc national de Ibera, un vaste réseau d'étangs et de marécages, immense réservoir d'eau douce de la planète. La route s'arrête brusquement laissant place à une piste poussiéreuse de 110 km. On a pris soin de tout calfeutrer avant de partir pour éviter les entrées de terre rouge dans Philéas. Il ne reste plus qu'à dégonfler un peu les pneus, éviter d'écraser la chèvre et partir à l'assaut du ripio, la piste, vitesse moyenne 40 km/h.

De part et d'autre de la piste il y a des marécages et nous ne tardons pas à rencontrer les habitants du coin.

dont de très nombreux carpinchos ( capybaras au Brésil ) et les adorables cerf des marais.

On roule tout en nous félicitant de l'étanchéité à la poussière dont fait preuve Philéas, c'est donc de bonne humeur et en musique que nous subissons les secousses du ripio.

Soudain, juste avant d'arriver, on entend un cri, Aloys donne l'alerte ! on se retourne et on voit un nuage de fine poussière rouge se déposer PARTOUT !!! On a oublié que le chauffe eau se déclenche en fin de journée et qu'il aspire l'air extérieur !!! On le saura pour la prochaine fois mais en attendant je suis un peu dévastée, il va falloir tout vider pour tout nettoyer, ce que l'on a fait il y a trois jours à peine !

On s'arrête au centre d'informations du seul petit village du coin pour se changer les idées et acheter un livre sur la faune de la région. Je laisse Gaspard et Aloys devant un petit film de présentation du parc national pour sortir mes chiffons et traquer l'ennemi. On file dans un camping juste avant la tombée de la nuit magnifique, éclairée par les étoiles certes mais aussi par des milliers de lucioles qui volent partout dans les herbes hautes. Nous sommes seuls. De quoi oublier la poussière pour ce soir !

Mardi 18 Septembre 2018, entre deux placards à nettoyer j'observe les jolis oiseaux sans avoir le temps d'aller trouver leur nom dans les nombreuses pages du livre du parc.  Aloys a carte blanche pour explorer le coin et occuper sa journée tandis qu'avec Gaspard on boute l'ennemi hors de Philéas !

De drôles de petits bêtes sortent de leur cachette pour brouter l'herbe, je crois que ce sont des vizcachas

Au coucher du soleil on part se promener sur les passerelles en bois qui serpentent dans les marais habités ...

On profite du silence absolu lorsqu'un énorme bourdonnement enfle soudain. On réalise que ce sont des nuées d'insectes qui se déplacent. Le bruit est impressionnant. On court reprendre nos vélos pour échapper à l'invasion massive de moustiques et moucherons en tout genre.

Mercredi 19 Septembre 2018, ce matin nous avons rendez-vous avec le garde du parc qui s'occupe aussi du camping. On part pour une balade en barque dans une petite partie des esteros, les étangs.

Espèce protégée, le Yacaré ou Caïman noir, pullule sur les berges. Gavés de pirhanas, ils digèrent paisiblement.

Celui-ci s'est fourré l'herbe dans l’œil !

Ils cohabitent avec les carpinchos, plus gros rongeur du monde, placides et sympas, on aime bien leur bouille.

De temps en temps on voit surgir une ravissante biche

C'est un paradis pour le martin-pêcheur, petit ou géant.

Une cigogne d'Amérique se promène tranquillement, chacun cohabite en bonne harmonie.

Une maman croco veille sur sa portée.

Après cette grande matinée poétique et un déjeuner sur l'herbe il est l'heure de reprendre le ripio poussiéreux, les écoutilles bien fermées et le chauffe eau condamné.

Un dernier carpincho pour la route et vamos, nous retournons à Mercedes.

Jeudi 20 Septembre 2018, réveil en fanfare par les écoles du coin, une journée récréative et vaguement sportive, sono à fond ... Ses devoirs terminés Aloys se mêle illico à la partie de foot un peu désertée ...

... et pour cause, ils sont tous devant Philéas ! J'ai proposé une visite à l'un d'entre eux et je me retrouve avec une cinquantaine d'enfants qui se succèdent deux par deux puis trois par trois ! Les garçons ont les yeux rêveurs, les filles scrutent la déco et ouvrent les placards ! L'une d'entre elle revient pour la troisième fois avec ses copines et, à l'aise, elle s'enferme dans la salle de bain. Je réalise qu'elle va faire un petit pipi mais Gaspard vient juste d'enlever la cassette pour la nettoyer. J'arrive à temps à la faire sortir et à lui expliquer comment tout ça fonctionne ! Gros fou rire !

Une fois les enfants installés dans l'herbe pour leur pique-nique nous pouvons lever le camp. Ils crient tous pour nous dire au revoir. Aloys qui les observe avec envie a du mal à partir. Pourtant l'endroit n'est pas franchement reluisant ...

Un petit tour en "ville" pour essayer de recharger la carte internet, toute une histoire, on ne peut pas payer par carte bancaire et on ne peut charger que pour 200 pesos, 4,50 euros. Avec ça on peut ensuite acheter des unités internet, simple ! On tombe sur une dame adorable qui se démène pour nous arranger et nous faire l'opération plusieurs fois afin de créditer le compte pour plusieurs semaines. On reste une bonne heure avec elle, elle nous pose dix mille questions sur notre voyage, elle a les yeux qui brillent, nous embrasse dix fois et dans tout ça je n'ai pas pensé à la prendre en photo cette gentille dame du magasin de téléphonie en face de la place à côté d'un médiocre resto dans lequel on atterri car il est tard et qu'Aloys crie famine.

On quitte cette bourgade sans grand charme, aux rues tirées au cordeau, comme toutes les petites villes d'Argentine, et à la fontaine élue la plus kitsch de l'année. Seuls les arbres de la place mettent un peu d'alegria !

Direction 270 km plus à l'Ouest, le long du rio Parana, on va à Resistencia non par plaisir mais pour remplacer la dalle de verre de l'ordi, on s'est rendu compte qu'elle était cassée après notre départ de Montevideo et on a trouvé un réparateur qui a la bonne pièce dans cette ville.