· 

De Tupiza au lac Titicaca

Mercredi 20 Mars 2019, nous avons quitté Tupiza hier assez tard et dormi sur la route qui mène à Potosi, très encombrée de camions crachant une fumée bien noire. Beaucoup accrochent des branchages à l'arrière on ne sait pas pourquoi mais ce n'est certainement pas pour mieux respirer ! On double dès qu'on peut mais la route est raide et pleine de virages.

4000 m d'altitude, on arrive à Potosi. Ville minière fondée en 1545 pour exploiter les énormes filons d'argent cachés dans la montagne qui vont alimenter les caisses de la Couronne Espagnole.

Le GPS nous fait arriver par le haut de la ville et on comprend vite que ça va être compliqué quand on descend par d'étroites ruelles très pentues. Et ce qui devait arriver arriva ... on reste coincés malgré les certitudes de quelques Boliviens bien intentionnées qui nous disaient que "si si pasa pasa".  Rien de grave en soi, il suffit de faire marche arrière toute sauf que Philéas, probablement très stressé par son inconfortable situation, décide à ce moment là de faire la grève ! Le moteur ne veut pas redémarrer ! On ne s'énerve pas, on fait la circulation (cette minuscule rue est hyper empruntée par bus, voitures et piétons ...), je tente de calmer une dame âgée manifestement très en colère de ne pas pouvoir passer par là car elle tape Philéas avec sa canne !!! Gaspard et Cyriaque tentent de comprendre d'où vient le problème. On finit par téléphoner dans un centre Iveco en France, le monsieur au bout du fil nous trouve la panne tout de suite : c'est un fusible qui a grillé . Ouf, une broutille. Un nouveau fusible et on peut faire marche arrière sans dommages.

Juste au coin de la rue une dame nous fait signe de nous garer devant sa petite cantine familiale. Elle nous conseille de rester là et nous propose de nous garder Philéas pendant que nous visitons le centre de Potosi. Adorable. Nous discutons dehors un moment avec elle et sa fille avant de réaliser qu'il est déjà tard, nous avons faim, on décide donc de pousser la porte de la cantine. Menu unique, soupe délicieuse, poulet, riz, légumes, les portions sont énormes, c'est simple mais c'est très bon. Pour l'équivalent de deux euros par personne !

Merci à Tatiana, sa maman et toute la famille pour leur bon repas et leur gentillesse.

Repus et Philéas en sécurité nous pouvons descendre les ruelles vers la place centrale toute proche. La ville, quand elle n'est pas encombrée par les dizaines de mini bus crachant et toussant leur fumée noire, est pleine de charme malgré le temps maussade. Un peu délabrée, dans son jus, elle conserve quelques traces de son riche passé.

Le ciel noircit, l'averse tombe, subite, forte, fraiche ! On se réfugie dans le magnifique bâtiment du musée de la monnaie, là où les pièces de la Couronne Espagnole étaient frappées. Une visite très intéressante pour comprendre comment l'argent trouvé dans les mines était travaillé.

A la fin de la visite on fait nos touristes en achetant une pièce d'argent que l'on frappe de nos propres mains !

Le ciel s'est dégagé, on flâne encore un peu dans les rues en marchant lentement, l'altitude se fait sentir. On aime bien cette jolie ville un peu bordélique mais on décide de ne pas y rester, trop compliqué de trouver un parking pour la nuit et la rue dans laquelle nous sommes est trop en pente, on ne peut pas y dormir. On discute encore un long moment avec Tatiana et sa maman puis c'est l'heure du départ. On stresse un peu pour trouver la sortie, on remonte des côtes abruptes, Gaspard reste zen au volant et on finit par retrouver la route avec soulagement. C'est la fin de la journée, on roule quelques kilomètres avant de trouver un terrain de foot devant un pensionnat de campagne pour y passer une nuit au calme. Demain autre journée, autre ville, ce n'est pas ce que l'on préfère avec Philéas ...

Jeudi 21 Mars 2019, Sucre, capitale constitutionnelle du pays. Bien moins haute que Potosi, 2800 m, on y respire mieux et les rues y sont plus larges quoique toujours bien pentues. On a trouvé un point de chute dans le jardin d'une propriété en plein cœur de la ville. Mais Philéas n'a pas passé le portail ! Heureusement la propriétaire, adorable, nous a proposé un plan B, l'entrée une rue plus bas par un portail plus grand dans une autre partie du jardin servant de parking aux gens du quartier.

Comme partout en Bolivie les chiens occupent les trottoirs ou les routes. On se méfie et nous restons très prudents mais pour l'instant nous n'avons vu aucun signe d'agressivité.

Sucre est une belle ville, toute blanche, pleine de charme avec ses toits en tuile et ses bâtiments coloniaux bien préservés. Mais il y a énormément de mini bus et de voitures qui encombrent les jolies petites rues.

On déjeune au restaurant de l'Alliance Française avant de faire un petit tour au marché bien achalandé. Des montagnes de fruits et de légumes. On oublie que la Bolivie produit des fruits tropicaux, une partie du pays jouxte l'Amazonie !

Vendredi 22 Mars 2019, matinée compliquée pour faire travailler Aloys ... Gaspard et Cyriaque partent se promener tandis que je m'occupe de l'élève récalcitrant. Il y a des jours plus faciles que d'autres ! Nous sommes tous fatigués. Notre expédition dans le Sud Lipez, l'altitude, les kilomètres. Je prépare un déjeuner avec plein de légumes et on refait le monde autour d'une bonne bouteille. Personne n'a envie de bouger aujourd'hui malgré le beau temps. Et évidement lorsqu'on se décide à aller faire un tour le ciel s'est couvert ! Il est un peu tard pour les visites, tant pis, on se contente d'une marche dans le centre.

Et on se retrouve au milieu d'un défilé militaire !

Après renseignements c'est le 23 Mars que la Bolivie remue le couteau dans la plaie, le" jour de la mer" : elle commémore la perte de son accès à la mer, toute la région d'Antofagasta, annexée par le Chili en 1879 pendant la guerre du Pacifique. Une plaie non refermée quand on écoute les voix tonitruantes des militaires chantant avec force le retour d'un accès à l'océan. Un deuil que le pays refuse de faire, des négociations sont lancées régulièrement pour tenter de récupérer le territoire perdu.

Samedi 23 Mars 2019, Jour de la mer donc, on a bien choisi le moment pour sortir de la ville encombrée mais on arrive à se faufiler avec patience entre les embouteillages. On reprend la route dans la montagne, la jolie Sucre s'éloigne, le silence revient.

On s'arrête assez vite pour jeter un coup d’œil sur une double curiosité. Une paroi qui était le sol au temps du Jurassique s'est complètement soulevée et les pas des dinosaures incrustés se sont retrouvés à la verticale ! 

Il faut essayer de faire abstraction du lieu de la découverte, une cimenterie !

Les traces de pas sont bien visibles et nombreux ! Incroyable.

La saison des pluies se termine en Bolivie mais la route en garde encore des traces. Un peu partout des éboulements freinent notre avancée même si ils sont partiellement dégagés.

On irait sûrement plus vite comme ça !

Mais comme nous ne sommes pas pressés ça tombe bien, on prend le temps de nous arrêter là où ça nous semble joli. Au bord de cette lagune pour un pique-nique bucolique par exemple.

Dimanche 24 Mars 2019, charme et délabrement dans le petit pueblo de Tarata. On s'y arrête pour prendre de l'essence. En vain. La station service ne peut pas servir les plaques étrangères. En Bolivie l'Etat prend en charge le coût de l'essence qui est vendue à très bas prix aux Boliviens, 3 Bob soit 0.38 centimes d'euros ! En contrepartie les étrangers doivent payer le prix "fort", 1 euro le litre . Depuis notre entrée en Bolivie nous avons toujours réussi à négocier autour de 6 Bob en payant "sin factura", en liquide ... Mais dans certaines stations c'est plus compliqué ou alors il faut remplir avec des bidons facturés au prix bolivien ... et celle-ci ne peut carrément pas servir les étrangers. Pas grave, on verra plus loin. On en profite pour faire un tour dans ce village dont les jolies maisons d'autrefois tombent en ruines. L'adobe résiste mal au manque d'entretien mais fait un bon terreau !

Quelques kilomètres après le village nous tombons sur une station-service flambant neuve. Les pompistes, adorables, nous expliquent qu'ils attendent les machines permettant de faire une double facturation, la station vient juste d'ouvrir ses portes. La patronne sort et nous autorise à remplir notre réservoir avec des bidons que nous n'avons pas. Les pompistes nous proposent de le faire pour nous mais à l'abri des caméras de surveillance, il y en a dans toutes les stations !

Nous nous garons sur le côté et tandis que les pompistes font des aller-retour je discute avec la patronne et sa sœur. La nuit va bientôt tomber, tout le monde nous conseille de rester là par sécurité. On dort donc dans une station service, bien surveillés par le gardien.

Lundi 25 Mars 2019, sur la route de Cochabamba soudain un péage !

De Cochabamba nous ne verrons qu'un supermarché. La ville ne nous attire pas plus que ça, on file sur la route de la Paz. 

Sur la route de La Paz soudain une manif !

Et pas une petite. Tout est bloqué bloqué. Une autre spécialité Bolivienne quasi quotidienne. On suit un camion qui prend un chemin de traverse.

Carrramba, raté ! Les manifestants ont bloqué le pont qui traverse la rivière. Aucun moyen de passer.

On se pose et on sort la pelle et les bâtons pour essayer de faire diminuer le tas de terre ...

Il faudra la journée, entrecoupée d'un déjeuner et de discussions avec les passants bloqués comme nous. On aide le conducteur d'une ambulance dédiée aux soins dentaires à passer sur le pont. Il nous promet de revenir nous aider dans une heure. Et une heure plus tard on le voit débarquer avec sa femme et sa sœur armés de pelles et de pioches pour nous aider à tasser un peu plus la terre et nous faire enfin traverser la rivière !

Mais ce n'est qu'une petite victoire, le chemin vers La Paz reste totalement bloqué nous disent-ils. Alors ils nous demandent de les suivre et nous emmènent chez eux ou plutôt chez leurs parents. Et voilà comment on se retrouve chez abuela et abuelo, au milieu des petits-enfants, poules, poussins, lapins, une joyeuse tribu ! Ils nous proposent de remplir le réservoir d'eau de Philéas, nous invitent à dîner, adorables, simples, généreux.

Les enfants investissent le camping-car, les filles découvrent Paris en pop-up, on discute tandis que je prépare une polenta.

On débouche des bouteilles, on trinque, on rit, on échange, on partage. Gaspard et Cyriaque proposent de faire la vaisselle. Après renseignements la famille nous conseille de rester devant chez eux, de nous coucher tôt et de partir à l'aube avant la reprise des barrages. La route est encore inaccessible à cette heure ci mais dans la nuit les manifestants désertent les lieux, aidés par la police ...

Et voilà comment une journée pourrie se transforme en belle rencontre !

Muchissimas gracias a toda la familia Martinez Canoa. Que lindos los momentos con vosotros ! Espero que un dia volveremos ... Un abrazo a todos. Tchin amigos !

Mardi 26 Mars 2019,  à 5h nous réussissons à franchir le barrage, au pas, dans des embouteillages monstres et sous une pluie battante ! Cyriaque et Aloys dorment bien au chaud et ne se réveillent que quelques heures plus tard pour un petit déjeuner au bord de la route.

On roule bien, le long des champs de quinoa. A une cinquantaine de km de La Paz on bifurque vers une petite lagune en pleine pampa. Pour une fois il est tôt, on en profite pour faire une bonne partie de pétanque sous le regard d'un troupeau de biquettes et de lamas.

Mercredi 27 Mars 2019, 10h30, on redescend vers la route de La Paz lorsqu'on croise un Kombi et deux jeunes Français dedans. On s'arrête sur le bord du chemin, on papote, on papote, on papote et il est midi. Alors comme on a le temps de décider du temps on décide donc de retourner nous poser au bord de la lagune et de continuer à papoter ! Demi-tour, on reprend la piste.

Et on ressort la pétanque. Provence contre Bretagne, c'est la Provence qui l'emporte !

On aurait bien aimé faire participer la Bolivie !

Un déjeuner dehors en plein soleil et un dîner dedans car le vent souffle et qu'il fait un froid glacial le soir sur les hauts plateaux. C'était très sympa cette rencontre et on a maintenant l'adresse de la meilleure boulangerie de Douarnenez qui fait les meilleurs Kuign Amann de Bretagne ! A bientôt Fanny et Jérémy !