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On passe au Chili

Mercredi 28 Novembre 2018, qu'est-ce que j'aime ces réveils posés comme ça au bord d'une estancia avec pour seuls voisins des moutons lointains ou quelques timides guanaco. Et ce matin c'est sublime.

Nous sommes au Chili, à quelques kms de l’embranchement qui mène à la colonie de manchots royaux. Mais cette fois-ci le chemin c'est tout droit, vers la petite ville de Porvenir où un ferry nous fera quitter l'île de la Terre de Feu pour rejoindre Punta Arenas, la ville Chilienne tout au sud du continent Américain.

Ah oui, nous avons un invité ! Georges ! Récupéré hier au rond point de Rio Grande, dépité par cinq longues heures de pouce en l'air , en vain ! C'est donc avec lui que nous passons les frontières vers 20h. Pour entrer au Chili une emmerdeuse fouille Philéas en essayant très manifestement de faire ses courses. Tiens, une saucisse fumée, menu parfait avec un sachet de légumes secs dont elle me demande comment je les cuit !!! Oh, du jambon cru sous vide (elle venait de me dire que tout ce qui était sous vide et fermé était ok !). Mais là Gaspard a exigé la destruction immédiate et sous nos yeux des produits confisqués et, miracle, elle me dit qu'en lisant bien elle voit que le produit vient d'Espagne donc qu'on peut le garder !!! Elle prend au passage un gros sac d'abricots secs ouverts le matin même, me choure ma réserve de feuilles de laurier ( pour cuire les légumes secs ce sera top !), lorgne sur le fromage emballé (elle n'a pas osé) et finit par abdiquer devant un sac de maïs à pop corn dont elle aurait bien fait son apéro la garce ! Morale de cette histoire, ne jamais passer une frontière à l'heure du dîner !

90 km d'une piste magnifique le long du détroit de Magellan pour arriver à Porvenir. On se régale. Jusqu'au moment où résonne le bip fatidique. Et comme hier matin ce n'est pas pour rien ! Un nouveau pneu se dégonfle ! Et plus de roue de secours ! On ne panique pas, Gaspard sort le compresseur et regonfle. Deux fois suffiront pour atteindre notre but dans un soulagement collectif.

Le littoral est parsemé d'abris de fortune, points de chute des pêcheurs du coin.

Quelques bicoques anciennes bien pimpantes, une église immaculée, certaines rues de Porvenir ont du charme. On s'y arrête le temps de déjeuner et de réparer la roue car, miracle, en nous garant devant une église, le trou dans le pneu est apparu juste sous nos yeux. C'est l’œuvre d'un petit caillou tranchant, fréquent sur les pistes. Gaspard met une mèche mais constate l'usure des six pattes de Philéas ... à changer ... joyeux Noël ...

En nous renseignant un peu on apprend qu'il faut prendre des billets pour le ferry. Et à l'agence on nous explique qu'il y en a un à 20h30 mais qu'il est plein, on ne pourra donc partir que demain à 13h. En insistant on comprend qu'on peut essayer de nous présenter au départ, avec un peu de chance on aura une place. Nous partons en direction du port.

Les bateaux, les couleurs, les reflets, je craque !

Dommage, nous n'avons pas le temps de faire ce chemin côtier le long du Détroit. Tout est paisible. Un banc de dauphins s'amuse en contre-bas, nous les suivons un peu avec Philéas car ils sont trop rapides.

En attendant le bus on sait ce qu'il faut faire ... boire pour oublier qu'il ne passe pas souvent !

19h. On gare Philéas sur le parking juste devant le ferry déjà à quai. Gaspard va dans la salle d'attente à l'intérieur du bâtiment. Aloys et Georges jouent aux Lego. Je guette. On attend. Je vois le responsable à qui j'avais parlé dans l'après-midi. Il regarde Philéas et dit au type qui s'occupe de placer les véhicules dans le bateau que nous avons nos billets pour demain mais qu'on aimerait bien partir ce soir. Tout le monde embarque, malheureusement un double semi-remorque est dans la file, je ne vois pas comment Philéas pourrait se glisser au milieu. Et en effet, à 20h30 pétantes le ferry met les gaz et décolle du quai. Raté. Je suis dépitée car j'ai vu la météo, demain, temps de chien ...

On ne comprendra jamais comment ni pourquoi le ferry fait marche arrière toute, se recolle au quai et on nous demande d'embarquer ! Gaspard glisse Philéas dans un coin. On rêve ! Trop contents et un peu ahuris. J'en oublie le contre-jour !

La Terre de Feu s'éloigne dans une vision de carte postale, un magnifique clin d’œil de cette île si particulière, au caractère bien trempé qui a su nous en dévoiler ses plus beaux côtés. Souvenirs inoubliables.

La Philéas Team enfile sa tenue grand-air pour ne rien louper du spectacle.

Ce n'est pas tous les jours que nous aurons droit à un coucher de soleil au milieu du détroit de Magellan ! J'espère que mon ami Fernand aura pu lui aussi admirer un ciel aussi beau en 1520 mais il parait qu'il a eu un temps pourri le pauvre. J'en profite pour lui !

Deux heures vingt plus tard d'une traversée sans nuage les lumières de Punta Arenas apparaissent. Un dernier glissement et le ferry accoste en douceur. Et pour conclure cette journée parfaite une surprise nous attend sur le quai ... nos amis retraités, Yves et Nickie nous font de grands gestes! Il est 23h mais ils nous attendaient. On savait qu'ils étaient là, ils prennent le ferry demain matin, ils vont à Ushuaïa. Mais on ne voulait pas les déranger à une telle heure. On est trop contents de les voir et c'est naturellement que la soirée se poursuit par un apéro dans Philéas, ça faisait longtemps ! On se raconte nos routes respectives avec autant d'enthousiasme dans un sens comme dans l'autre. La suite risque d'être aussi passionnante que ces 11.120 premiers kilomètres en Argentine ! On continue ! Vamos !